Ouvrir un bureau à Dubaï, les conseils des Marocains de Buzzeff
Toutes les trois semaines, le Casablancais Jérôme Mouthon se rend à Dubaï, à sept heures de vol du Maroc, pour travailler dans la filiale dubaïote de son entreprise Buzzeff. Un rythme intense pour un père de famille mais une nécessité pour son agence de diffusion et de monitoring de vidéos qui a pour ambition de devenir le numéro 1 régional.
Il faut dire que Jérôme Mouthon est bien conscient des sacrifices nécessaires pour réussir à lancer son entreprise. Dans les années 90, le Français monte et vend Clarsys. Il remet le couvert en 2002 lorsqu’il décide de déménager à Casablanca d’où sa femme est originaire, en y lancant Finashore, une agence web à destination des entreprises françaisesn qui grossit et se diversifie jusqu’à atteindre en 2007 250 salariés et 4 millions de chiffre d’affaire. De nouveau, Jérôme cède son entreprise. En 2010, il lance Buzzeff au Maroc, grâce à un investissement et l'acquisition de la licence pour la région MENA de Ebuzzing, le n°1 européen de diffusion vidéo sur internet.
Le projet s’avère trop innovant pour l’époque et le marché. « La vidéo n’existait pas au Maroc », m’explique le fondateur ajoutant que « le marché est petit et n’atteindra sa maturité que dans trois à quatre ans ». Buzzeff se transforme de fait en agence web, ce qui ne convient pas à Jérôme.
En 2012, l’équipe décide donc de se recentrer sur son projet initial en développant le projet de diffusion de vidéos régionalement afin d’agrandir son marché et de toucher des pays comme les Emirats, l’Arabie Saoudite et l’Egypte. Buzzeff réduit son équipe de 45 à 10 personnes et engage une levée de fonds.
En juin 2012, la startup lève 1,2 million de dollars soit près de 11 millions de DHM auprès d’un fond de capital de développement luxembourgeois (SOLORUN) et d’entrepreneurs du web européen tels que Marc Menasé (fondateur de Nextedia, Meninvest), Said Saad (fondateur de MonsieurPrix, Cyréalis et Shopbot) ou Emmanuel Françoise (fondateur de Creanet, Overgame et Topfinance.com).
La majorité des agences média régionales étant réunies dans le Media City de Dubaï et la majorité des filiales des grandes marques régionales et internationales de la région dépendant de Dubaï, l’équipe décide d’y ouvrir un bureau pour gérer l’aspect commercial.
Prendre le temps de gérer l’administratif
Première étape : ouvrir un compte en banque local pour pouvoir obtenir une licence. Plus facile à dire qu’à faire car, après la crise de 2008-2010 et les nombreux expats partis en laissant des créances, les banques se méfient.
Jérôme Mouthon se dirige d’abord vers une banque internationale à qui il faut expliquer ce que fait l’entreprise et fournir un descriptif détaillé de tous les actionnaires. Las d’attendre, l’équipe se tourne vers une banque locale et arrive assez rapidement à ouvrir un compte leur permettant d’obtenir la licence début janvier 2013.
En tout, ils auront mis trois mois et demi pour ouvrir un compte et se retrouve avec deux comptes en banque. « On aurait du s’en occuper plutôt », avoue l’entrepreneur.
Le Français peut alors ouvrir son bureau et choisit de le faire à Internet City. Le choix de l’implantation n’est pas à sous-estimer dans une ville aussi grande, explique t’il. Internet City était la meilleur option pour Buzzeff, estime t'il, car cela leur permet non seulement d’être entourés d’autres acteurs du web, mais aussi d’être à cinq minutes de tous leurs clients installés à Media City.
En règle général, Jérôme conseille de rentrer en contact avec les expatriés qui ont déjà fait ce que vous voulez faire et qui vous conseilleront et vous mettront en contact avec les bonnes personnes.
Pour le recrutement, il faut faire des allers retours fréquents
Dès août 2012, Jérôme commence à monter son équipe sur place. Pour recruter, l’entrepreneur passe par LinkedIn, puis se rend sur place une semaine pour rencontrer les candidats avant d'en sélectionner trois. Le premier employé commence en octobre 2012, trois mois avant l’obtention de la licence.
Il faut alors revoir un peu le fonctionnement de Buzzeff car les équipes dubaïotes ne fonctionnent pas comme les marocaines. La façon de faire est plus anglosaxone à Dubaï qu’au Maroc et les équipes ne parlent pas les mêmes langues et ne vivent pas au même rythme (que cela soit les quatre heures de différence ou le weekend décalé).
Pour autant, ce n’était pas le plus difficile, explique Jérôme, la véritable difficulté c'était la distance, n’être dans les bureaux qu’une semaine sur deux, ne pas pouvoir suivre le travail sur place. En un an, deux employés ont été remerciés. La seule solution : être sur place autant que possible.
Fin 2013, l’entreprise avait atteint 5 millions de vues et voyait son chiffre équitablement réparti entre le Maroc et Dubaï. Cela risque de changer cette année puisque Jérôme Mouthon prévoit que 65% des opérations soient signées à Dubaï et 35% au Maroc. Un bon signe pour la régionalisation de l’entreprise.
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